«Ma jumelle m’a quitté dans la dignité» de Paul-François Sylvestre: La vie avant la mort
Chaque semaine, le RECF vous présente
une nouveauté franco-canadienne
Ma jumelle m’a quitté dans la dignité de Paul-François Sylvestre
La vie avant la mort
Il y a des sujets difficiles à aborder, comme la maladie et la mort, surtout quand elles sont près de nous. Pourtant, pour l’auteur franco-ontarien Paul-François Sylvestre, elles furent plutôt un moteur, une inspiration pour voir le bon côté des choses et ainsi rendre hommage à une femme forte, qui est restée digne même dans la souffrance et dans le dernier souffle. Sa propre sœur jumelle, née deux minutes avant lui mais ayant, selon ses dires, une force psychologique deux fois plus grande que la sienne, est le sujet de sa plus récente parution, Ma jumelle m’a quitté dans la dignité, publié aux Éditions du GREF.
Paulette Marisi souffrait de la sclérose en plaques, mais elle n’en parlait pas. À 49 ans, elle a dû quitter son poste de professeure à la Faculté d’éducation de l’Université de Régina, parce que la maladie progressait trop. Pour le climat plus favorable, elle s’est installée en Colombie-Britannique où, pendant presque vingt ans, sa condition s’est malgré tout détériorée. Mais son propre frère jumeau, l’auteur Paul-François Sylvestre, ne l’a jamais entendue se plaindre. Les derniers mois, c’était vraiment pénible, elle ne pouvait plus rien faire, ne pouvait plus marcher, ne pouvait plus se servir de son bras droit, ne pouvait plus aller à la toilette, prendre son bain ou quoi que ce soit. Elle avait des aidants naturels qui venaient tous les jours, mais elle ne voulait pas mettre les pieds dans une maison de soins de longue durée. Elle disait qu’elle avait vécu dignement toute sa vie, et qu’elle partirait dignement.
Pourtant, la loi sur l’aide médicale à mourir lui refusait ce privilège au Canada. Malgré la détérioration constante de sa condition de vie, il lui fallait être reconnue comme étant en phase terminale pour avoir accès à cette pratique. Ce que le livre raconte, c’est comment elle ne pouvait pas bénéficier de la nouvelle loi et a fait appel à Dignitas, en Suisse, raconte l’auteur et frère de Paulette Marisi, qui a appris les démarches de sa sœur quand elle leur a envoyé, à leurs sœurs et à lui, un courriel avec la brochure de l’association, leur demandant de la lire de la première à la dernière ligne. Évidemment, ça a été un choc, et elle nous a envoyé la lettre, sa demande à Dignitas, que j’ai inclue dans le livre.
C’est en effet grâce à de nombreuses lettres que Paul-François Sylvestre a réussi à reconstituer tout le cheminement de sa sœur, et la façon dont elle a joué un rôle rassembleur dans la famille, au sein de laquelle plusieurs ponts étaient brisés. Moi, j’étais la centrale, je recevais toutes les communications, tout ce que Paulette envoyait à mes neveux, à mes nièces, à nos sœurs Fernande et Jacqueline. J’avais copie de tout, et ça m’a permis d’écrire plusieurs chapitres où je montre comment elle a été une force rassembleuse dans toute notre famille.
Ce sont avant tout ce caractère fort, digne et déterminé, mais aussi le côté très articulé et invitant, lumineux, magnétique, presque, de sa sœur que l’auteur a souhaité mettre de l’avant dans Ma sœur jumelle m’a quitté dans la dignité, plutôt que de se faire le porte-étendard des gens atteints de sclérose en plaques ou de se lancer dans une joute politique en critiquant la loi sur l’aide médicale à mourir. Je trouve que le livre devrait parler de lui-même. J’ai essayé d’enfoncer le clou en écrivant deux textes sur la loi dans Le Droit, mais la raison pour laquelle j’ai écrit le livre, c’est pour montrer que même dans l’adversité, malgré la douleur physique et surtout psychologique – moi je ne l’ai jamais entendue se plaindre! -, ma soeur était tellement forte!
Le récit Ma jumelle m’a quitté dans la dignité de Paul-François Sylvestre est publié aux Éditions du GREF.
Alice Côté Dupuis
5 avril 2017