Pourquoi, Paloma, pourquoi?
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Le secret de Paloma
de Michèle Laframboise :
Pourquoi, Paloma, pourquoi?
Paloma n’est plus, son corps a été retrouvé dans le désert. Elle n’est pas rentrée et n’a pas passé le rideau de fer qui protège les humains des nuits froides de la planète Sérail. Alouette est dévastée et n’arrive pas à comprendre les raisons du suicide de son amie. Était-ce vraiment un suicide? L’orbite du Troll, une comète malfaisante dont la traîne bombarde la planète de météorites, serait-elle liée à cette mort prématurée? Le journal intime de l’adolescente, où se trouve peut-être la réponse, a disparu. Avec Le secret de Paloma, son deuxième roman paru dans la collection 14/18 des Éditions David, Michèle Laframboise nous entraîne dans une enquête au cœur d’un monde hostile.
Voilà une œuvre très humaine, où les émotions et les secrets prennent toute la place. L’histoire est ficelée autour d’Alouette, jeune fille qui vient de perdre sa meilleure amie. L’autrice a construit un univers où les lourds secrets et le pardon peuvent avoir une influence sur la survie de toute une société. Ce roman, comme les précédents, part de l’amour qu’a Michèle Laframboise pour la science-fiction. J’aime la science-fiction depuis que je suis toute petite; j’en lisais et mon papa en possédait beaucoup à la maison. Elle a donc tôt lu les classiques du genre, dont Les robots d’Isaac Asimov et 1984 de George Orwell, pour ne nommer qu’eux.
Survie perpétuelle
L’autrice se sent impérativement poussée à créer des univers où les habitants font face à l’adversité. J’ai toujours été fascinée, dit-elle, par les problèmes de société présentés [sous différents angles]. Dans Le secret de Paloma, une colonie humaine s’est implantée sur une planète hostile. Les colons venus sur la planète Sérail pensaient vivre confortablement sous un dôme, avec la technologie, mais ils se rendent compte que ce n’est pas le cas, explique Laframboise. La vie y est, en effet, rude et difficile. Ils doivent gérer les ressources et travailler dur pour y faire pousser des plantes. Donc, il y a des adultes amers et déprimés, mais aussi des jeunes qui trouvent ça dur parce qu’ils n’ont pas choisi d’être là.
Le suicide est omniprésent sur Sérail. Il y a plusieurs personnes dans [l’histoire de] cette colonie-là qui se sont suicidées. Le thème occupe une grande place dans le cœur de l’autrice, qui confie avoir des cousins qui se sont suicidés. Et justement, le roman est dédicacé à une jeune cousine de quinze ans qui s’est suicidée. Le titre renvoie au secret qui a poussé le personnage de Paloma à prendre un soir la fuite pour ne plus jamais revenir. Alouette cherchera à découvrir ce qui est arrivé à sa grande amie pour qu’elle décide de s’enlever la vie. Elle va enquêter en interrogeant [son entourage] dans la colonie.
Tout au long du récit, le personnage principal d’Alouette est habité par les regrets, la culpabilité et l’impression de ne pas avoir été une bonne amie. Je comprends les émotions qui nous tenaillent quand on perd quelqu’un. Et qu’après coup, on se dit qu’on aurait pu aller parler à cette personne. On se questionne sur le pourquoi, on se demande si on aurait pu faire quelque chose de différent ou si on a été un(e) bon(ne) ami(e) pour cette personne. C’est ce que mon héroïne expérimente dans le livre. Elle a ces nuages de regret et de culpabilité qui s’amoncellent au-dessus de sa tête.
Le cumulus d’émotions vécues par les personnages après le suicide d’un être cher s’accompagne ici d’un mystère à caractère scientifique. Je crois que ça va [toucher une corde sensible] chez les adolescents puisque juste d’en parler, j’ai la larme à l’œil. En écrivant ce livre de science-fiction, je ne pensais pas aller puiser aussi loin dans mes émotions personnelles. Le roman s’adresse donc a priori aux adolescents, mais aussi à tout(e) amateur(trice) de ce genre littéraire.
Pour en finir avec le jugement
Il ne faut pas juger les autres, chaque personne est unique et capable de porter une charge émotionnelle distincte. C’est un peu le message qu’a voulu faire passer ici Michèle Laframboise. Dans le roman, le personnage d’Alouette ne tolère pas qu’on insinue que son amie Paloma se soit suicidée par faiblesse. La jeune fille se fâche en disant que Paloma n’était pas faible; elle était forte et travaillait très dur. On ne peut pas deviner quelle goutte a fait déborder son vase, explique Laframboise. Alouette est certaine que le « vase » de son amie était bien plus grand que le sien. […] On a tous un moment où « ça déborde ». En général, plus on évolue et plus notre endurance est grande. Mais parfois, le poids peut être trop lourd à porter.
Avec Le secret de Paloma, les lecteurs réaliseront l’importance de la communication, mais aussi celle de l’entraide. L’amitié et l’espoir sont essentiels pour vivre. Comme le dit l’adage, il faut un village pour élever un enfant. Mais ça prend aussi un village pour « réparer » une personne qui est abîmée. Je crois qu’il est important de communiquer et la résolution partielle de l’intrigue se fera d’ailleurs lorsque Alouette apprendra à communiquer.
Le roman jeunesse Le secret de Paloma de Michèle Laframboise est paru aux Éditions David, aux formats papier et numérique.
Julien Charette
23 juin 2021