“Basculer dans l’enfer” de Jocelyne Mallet-Parent: Comprendre l’incompréhensible

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Basculer dans l’enfer de Jocelyne Mallet-Parent
Comprendre l’incompréhensible
Il faut se rendre à l’évidence : la peur et l’horreur font dorénavant partie de nos vies. Partout dans les médias nous proviennent des nouvelles au sujet d’attentats divers, qu’ils aient lieu dans les transports en commun, dans des édifices importants ou même dans la rue, et personne n’a envie de se retrouver au mauvais endroit lorsque ça frappera à nouveau. Mais imaginez être pris par défaut dans ce tourbillon…parce que c’est l’un de vos enfants qui a commis ce geste irréparable? C’est l’expérience qu’a tenté l’auteure Jocelyne Mallet-Parent dans Basculer dans l’enfer, sa nouvelle parution de type thriller aux Éditions David.
Rapidement, Marc Haentjens, le directeur général des Éditions David, intrigue en révélant que le roman débute vraiment sur les chapeaux de roue, puisque ça commence par un attentat dans le métro de Montréal, qui est fomenté par deux jeunes, deux enrôlés : une Québécoise de souche et un fils d’immigrants moyen-orientaux, musulmans. On assiste à la préparation et au déroulement de l’attentat, presque minute par minute. Jocelyne Mallet-Parent, elle, résume son sujet plus globalement, en nous donnant davantage encore l’envie de plonger dans son œuvre : c’est un roman qui raconte l’histoire de trois jeunes qui se sont radicalisés, et puis c’est surtout l’histoire de l’impact que ça a eu sur leurs familles. Ce dont j’ai voulu traiter, ce sont les dommages collatéraux de la radicalisation.
On sent rapidement que le sujet fascine l’auteure, et qu’elle a effectué beaucoup de recherches pour se glisser dans la peau de ses personnages. Le phénomène qui m’a accroché, c’est pourquoi et comment ces jeunes-là en arrivent à adopter une cause qui n’est pas vraiment la leur, une cause pour laquelle ils vont aller jusqu’à tuer et jusqu’à donner leur propre vie, pour certains d’entre eux. Car une fois l’attentat réalisé, les jeunes Élise et Tariq s’enfuiront et iront jusqu’à carrément rejoindre le centre d’opération du djihad, au Moyen-Orient. S’ensuivra donc une poursuite qui contribuera à l’ambiance thriller du roman, impliquant Interpol et la police, représentée par un sympathique personnage qui prendra de l’importance : l’inspecteur Duval.
Il y a tout un rythme dans l’histoire qui est vraiment intéressant, et ça se lit tout seul; on ferme le livre et on n’a pas eu le temps de respirer tellement. Ça, c’est la force de l’écriture de Jocelyne Mallet-Parent, qui est vraiment très vivante, saccadée, et qui réussit à en faire un vraiment bon thriller, indique l’éditeur, qui semble aussi admiratif de l’angle de traitement du sujet utilisé par l’auteure. Tout le questionnement amené au sujet de comment on vit cette situation en tant que parent nous force à réfléchir de façon plus globale sur l’explosion du terrorisme. Je trouve que Jocelyne amène quelque chose d’intéressant à ce niveau-là, une réflexion sur ce drame de notre société actuelle. On peut voir le terrorisme comme quelque chose d’extérieur à nous, mais là, justement, on se rend compte qu’en fait, il est même chez nous, dans la société dans laquelle on vit.
Bien que les auteurs des attentats dont nous entendons constamment parler soient souvent des jeunes adultes, c’est sur les parents que l’auteure a choisi de diriger son regard. Le sujet était d’une ampleur, d’une complexité, surtout. Je ne suis aucunement une spécialiste de la question, donc en choisissant l’angle parental du sujet, ça devenait plus facile pour moi de me mettre dans leur peau, révèle-t-elle, ajoutant que les trois mères de famille dépeintes dans son roman proviennent de trois cultures et de trois milieux différents – une famille Québécoise « pure-laine », une famille d’immigrants musulmans de Montréal, et une moyen-orientale vivant toujours là-bas, dans l’horreur au quotidien – afin de bien circonscrire la question.
Nous suivons donc dans ce roman ces jeunes qui sont en fuite, mais aussi – et c’est la dimension plus psychologique du roman –, tout ce que vivent les parents de ces jeunes-là, ne comprenant pas comment la situation a pu en arriver là. Quand on ne comprend pas, on a tendance à juger et à porter de fausses interprétations. C’est vrai qu’en lisant et en essayant de comprendre le phénomène, pas seulement de ce côté-ci du globe, de savoir pourquoi le monde est en train de basculer comme ça dans l’horreur, ça m’a aidée à comprendre, explique l’auteure, qui espère que ses lecteurs arriveront aux mêmes résultats en lisant son roman, puisqu’elle n’a pas voulu porter de jugement ni cherché à départager le bien du mal, mais plutôt à poser beaucoup de questions et à faire réfléchir.
Le roman de style thriller Basculer dans l’enfer de Jocelyne Mallet-Parent est publié aux Éditions David.
Alice Côté Dupuis
6 septembre 2017