Le REFC présente: Catherine Bellemare, auteure

28 février 2019
Entrevues portraits
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Dès la parution de son premier roman, une autofiction intitulée Une irrésistible envie de fuir, l’auteure gatinoise Catherine Bellemare s’est fait remarquer pour sa langue crue et vraie, et son regard incisif sur le monde qui l’entoure. De retour avec Le tiers exclu où elle critique néanmoins avec tendresse les mauvais parents, l’auteure confirme sa place dans le milieu littéraire, jusqu’à être invitée d’honneur de l’édition 2018 du Salon du livre de l’Outaouais.

Bellemare_Catherine

 1. Quelles ont été les lectures marquantes de votre jeunesse?

Ce sont plus des lectures d’adolescence qui m’ont marquée, parce qu’encore à ce jour, je suis une profonde groupie – et je n’ai aucune honte à le dire – d’Amélie Nothomb. Je suis une fan finie, j’adore ce qu’elle fait, et trouve qu’elle exploite à la perfection le côté noir, et en même temps le côté plus léger; elle intègre bien les deux. C’est étrange comment elle écrit, mais c’est super intelligible, et en même temps ça peut être drôle. Donc je répondrais tous les romans d’Amélie Nothomb. Si j’avais à en cibler un, je dirais Tuer le père ou bien Pétronille, Stupeur et tremblements, évidemment, Le voyage d’hiver, Mercure…c’est vraiment l’ensemble de l’œuvre, finalement!

2. À quel moment avez-vous décidé de devenir auteure?

Honnêtement, c’est la seule certitude que j’ai eue dans ma vie. Ça a l’air d’être un gros défi pour notre génération de trouver ce qu’on veut faire comme carrière et où on s’en va, mais moi, ça a toujours été ma seule certitude : j’irais à l’université en Littérature française, et je savais que je voulais écrire des romans. Je ne voulais faire que ça. Quand j’étais petite, c’était déjà naturel pour moi, j’étais solitaire et j’écrivais dans ma chambre. À la petite école, il m’arrivait de demander de rester à l’intérieur pendant la récréation, pour écrire des histoires. Donc ça remonte à loin.

3. Quel genre de lectrice êtes-vous?

Je crois que je lis comme j’écris : de façon très éparpillée et désorganisée. Je lis toujours quatre ou cinq livres de front, je ne m’attarde jamais à un seul. Je suis un peu chaotique quand je lis, et j’écris, aussi, quand je lis : je fais des commentaires dans les marges, des réflexions. Si ça me fait penser à des trucs, je le note à côté, je souligne des passages que j’aime, et parfois je suis intense et je vais rayer des passages que je n’aime pas! Donc je ne suis pas quelqu’un qui va prêter ses livres beaucoup, parce que c’est complètement illisible pour quelqu’un d’autre, mes livres sont tout barbouillés!

4. Quel est votre mot préféré de la langue française, et pourquoi?

J’ai envie de dire « ambiguïté ». Parce que je crois que je suis quelqu’un de très ambigu, je pense que ça me représente bien, et phonétiquement aussi j’adore ça, je trouve ça mélodieux. Je trouve que c’est un concept tellement subjectif, aussi, l’ambiguïté; quelque chose que moi je trouve ambigu peut être super simple pour toi.

5. Êtes-vous du genre à juger un livre par sa couverture ou par son titre?

Souvent par son titre. Je trouve que c’est quelque chose de super important, qui va m’accrocher ou qui va me déplaire. En fait, le titre, mais aussi la première phrase d’un livre, sont pour moi super importants. En général, ce sont mes premiers critères, mais je vais aussi souvent ouvrir le livre au hasard et lire en diagonale juste une page, et normalement, ça me donne une bonne idée si je vais aimer ça ou non. Si ça passe les trois tests du titre, de la première phrase et d’une page au hasard, souvent je vais être contente de l’ensemble du livre.

6. Quel serait pour vous un auteur incontournable de langue française?

Je vais essayer de varier, parce qu’il y a Amélie Nothomb, évidemment! Parmi mes contemporains, une femme que je respecte énormément, c’est Marjolaine Beauchamp. J’ai eu le coup de foudre pour elle, et surtout quand elle fait des lectures, j’en ai des frissons juste de penser à ce qu’elle fait. C’est tellement accessible, c’est ça que j’adore de son écriture! C’est accessible, et c’est poignant; tu vis toutes sortes de choses quand tu l’entends, et on dirait qu’il faut que tu prennes position quand tu l’entends, tu ne peux pas rester impartial. Bref, j’adore ce qu’elle fait! Sinon, il y aurait aussi Delphine de Vigan que j’aime beaucoup, Justine Lévy, et dans les classiques, je dirais Sartre. Je trouve que Sartre mérite d’être lu, et Huis clos, c’est vraiment une œuvre qui m’a beaucoup marquée.

7. Est-ce qu’il y a un personnage fictif de la littérature que vous aimeriez rencontrer?

Je ne crois pas que beaucoup de gens le connaissent, mais c’est un personnage tiré d’un roman qui s’appelle La solitude des nombres premiers, et il s’appelle Mattia. C’est un adolescent qui est super doué en mathématiques et qui est autiste, si je me souviens bien, ou du moins la ligne est mince, mais c’est un surdoué. C’est un personnage extrêmement intelligent et complexe, compliqué; on dirait qu’il faut relire le roman quelques fois pour bien le cerner, et j’étais fascinée quand j’ai lu ce roman-là.

8. Quelle a été votre dernière lecture marquante?

J’ai lu Nord Alice, de Marc Séguin, parce qu’on nous a assigné le livre d’un des invités d’honneur du Salon du livre de l’Outaouais, et moi j’ai dû lire celui-là. Ce n’est pas mon style habituel, mais j’ai aimé ça! C’est très personnel comme écriture – déjà là, tu viens me chercher assurément – et il y a des passages qui se passent à Kuujjuaq, d’autres où il remonte dans le temps, parce qu’il y a comme deux histoires en parallèle. J’ai trouvé ça intriguant dès le début.

 Propos recueillis par Alice Côté Dupuis