Mégane et Mathis, d’Hélène Koscielniak :

faire fondre les préjugés, plutôt que les calories

26 avril 2022
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Mégane et Mathis, d’Hélène Koscielniak :
faire fondre les préjugés, plutôt que les calories

 

Après sept romans et recueils de nouvelles pour adulte, l’autrice Hélène Koscielniak effectue une première incursion dans le monde du roman jeunesse avec Mégane et Mathis, qui s’insére dans la collection 14/18 des Éditions David en avril. Inspirée par la société qui l’entoure, l’écrivaine a souhaité mettre de l’avant la réalité vécue par les personnes souffrant d’anorexie, et les effets de cette maladie sur l’entourage de ces personnes. Le tout, en créant un récit « efficace » qui saura rejoindre les adolescentes et les adolescents, qu’elle connaît et affectionne tant.

Mégane est une ado de seize ans qui souffre d’anorexie, raconte Koscielniak. Devant ses comportements bizarres, Mathis se demande ce qui arrive à sa jumelle : depuis leur naissance, ils ont toujours été proches, conscients en tout temps l’un de l’autre. Mathis se demande si ce lien est en train de se dissoudre. L’autrice a décidé d’intégrer un garçon à son histoire pour inciter davantage les jeunes hommes à lire, et du même coup pour les conscientiser, eux aussi, à l’anorexie, ce trouble qui touche de plus en plus de garçons. Elle affirme que son intention première était demontrer comment le fait qu’une personne souffre d’anorexie peut même, parfois, diviser les familles. Lui, il regarde sa sœur et se pose toutes les questions que d’autres personnes pourraient se poser; ça me permet donc d’expliquer ce qu’est la maladie.

Attention, toutefois : Koscielniak n’a en aucun cas voulu offrir un documentaire ou un manuel didactique sur l’anorexie. Son but est de dire ce qu’est l’anorexie, de conscientiser le lectorat au fait qu’il s’agit d’une maladie mentale, de repérer ses causes et conséquences et, surtout, de nommer les remèdes possibles, mais toujours en insérant ces éléments de façon fluide dans les interstices d’une intrigue amusante et attrayante pour les jeunes. [J’ai mis] beaucoup de temps à rédiger le livre, parce que je ne voulais justement pas faire la « maîtresse d’école » – que je suis! Mais tout ce qu’on doit [savoir sur le sujet] est là, entre les lignes, et on l’apprend en lisant l’histoire, ajoute l’écrivaine.

Celle qui a enseigné presque toute sa vie à des élèves d’environ quatorze ans (en huitième année), et qui a également des petits-enfants dans cette tranche d’âge, croit être bien au fait de ce qui anime les pensées des adolescentes et des adolescents, du vocabulaire qu’ils et elles emploient, des activités qu’ils et elles aiment pratiquer, etc. Entre les amourettes de Mégane, les textos, les médias sociaux (comme TikTok, Snapchat ou Instagram), le hockey et les animaux de compagnie de ses personnages, Hélène Koscielniak croit avoir incorporé dans son roman tous les ingrédients nécessaires pour piquer l’intérêt du lectorat jeune, tout en s’assurant que les parents d’enfants souffrant d’anorexie sauraient y trouver aussi des réponses à leurs questions ou des outils pouvant leur servir.

 

L’importance d’être bien entouré(e)

Comme Hélène Koscielniak n’est ni psychothérapeute, ni psychiatre, ni travailleuse sociale, et comme aucun de ses proches n’a souffert d’anorexie, elle a dû faire beaucoup de recherches afin de mieux comprendre son thème. Les rencontres et lectures qui en ont résulté lui ont permis de mieux naviguer dans ces eaux délicates et d’éviter de véhiculer tout jugement de valeur sur l’anorexie. On décrit beaucoup ça comme de l’entêtement. On dit : « Tu vas arrêter ça, tu vas manger! ». Mais c’est une maladie mentale, et j’essaie autant que possible de le montrer dans mon livre.

Les différents témoignages reçus, notamment ceux de spécialistes, ont permis à Hélène Koscielniak de créer un personnage des plus authentique, et de mieux comprendre la psychologie derrière ce trouble. Étant donné qu’il s’agit d’une maladie mentale, il fallait faire comprendre que Mégane ne raisonne pas de façon « normale ». Et afin de démontrer cet aspect-là, j’ai fait en sorte qu’elle personnifie ses peurs, raconte l’autrice de Kapuskasing. Ainsi, différents ennemis inquiètent Mégane au fil du roman : Affam, Cal, Malchance et Menace représentent respectivement sa faim constante, les calories qu’elle craint d’ingérer, les incidents malheureux qu’il lui arrive de vivre, ainsi qu’un élément de menace qui demeure mystérieux une bonne partie du roman, tenant ainsi les lecteurs et lectrices en haleine.

Mais ce qui ressort le plus de cette intrigue qui reflète la vie de beaucoup de jeunes d’aujourd’hui, c’est l’importance de la famille, de l’entourage, bref, de l’aide obtenue afin de guérir de cette maladie. À la fin du roman, Mégane elle-même l’affirmera : « Parce que j’ai eu de l’aide, parce que mes parents ont eu de l’aide, parce qu’on a rencontré des conseillers, conseillères, j’ai fini par m’en sortir. » C’est possible de s’en sortir, paraphrase l’autrice pour résumer.

« Le besoin le plus profond de l’être humain, c’est d’avoir un sentiment d’importance. »

Après s’être sérieusement plongée dans le sujet de l’anorexie, Hélène Koscielniak en arrive à cette conclusion : Tout revient, finalement, à la question de l’estime de soi. Comme le personnage de Mégane aura vécu de l’intimidation au cours de son enfance parce qu’elle était un peu ronde, l’autrice estime que tout être humain désire avoir une certaine importance, veut se sentir aimé, et s’y prendra de différentes façons [pour tenter de répondre à ce désir profond]. Si Mégane croyait qu’en maigrissant, elle serait davantage aimée, le roman Mégane et Mathis met en lumière l’importance de s’accepter tel(le) que l’on est et, surtout, de faire fondre les préjugés, plutôt que les calories.

 

Le roman jeunesse Mégane et Mathis d’Hélène Koscielniak vient de paraître aux Éditions David, dans la collection 14/18.

Alice Côté Dupuis
mars 2022