Fannystelle de Nadine Mackenzie: Un petit village avec une grande histoire

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Fannystelle de Nadine Mackenzie
Un petit village avec une grande histoire
C’est en effectuant des recherches pour un précédent ouvrage, Du sang bleu dans l’Ouest, que l’autrice Nadine Mackenzie a découvert le nom d’un personnage intriguant, le chanoine Rosenberg, dont tout le monde semblait se plaindre. Intimement lié au village de Fannystelle, à 50 kilomètres de Winnipeg, ce religieux allait faire parler du Manitoba jusque dans les journaux de France, et pour montrer à quel point l’histoire de l’Ouest canadien peut être fascinante, l’autrice a à son tour décidé de parler de lui dans son nouveau essai historique qui se lit comme un roman : Fannystelle, publié aux Éditions de la nouvelle plume.
Fondé en 1889, le village de Fannystelle, au Manitoba, a d’abord accueilli des aristocrates de France, qui ne connaissaient absolument rien à l’agriculture, et que des pionniers québécois ont du venir aider. C’est entre autres grâce à l’argent de la comtesse d’Albuféra que des groupes d’aristocrates sans travail en France venaient s’établir dans l’Ouest du Canada, mais surtout grâce au chanoine Rosenberg, qui s’est fait beaucoup d’argent parce qu’il vendait des terres aux aristocrates de France, mais ils les vendaient à plusieurs personnes! Donc quand les gens arrivaient au Canada, c’étaient des problèmes sans fin, parce que leur terre avait plusieurs propriétaires, raconte Nadine Mackenzie, qui a rapidement été absorbée par l’histoire rocambolesque de cet homme de foi qui s’est révélé être un grand escroc et un manipulateur.
Loin de s’en tenir aux ventes de terres, le chanoine Rosenberg a aussi fait la première page des journaux de France parce qu’il avait aussi mis en place une société d’annulation de mariages religieux, sous prétexte qu’il était très copain avec le pape de l’époque! Alors les gens payaient pour que leur mariage soit annulé, mais ils recevaient de faux certificats. Finalement, une femme l’a traîné devant les tribunaux! Vous imaginez, à une époque où les femmes n’avaient même pas le droit de vote, l’une d’elle faisait un procès à un religieux, s’exclame l’autrice, fascinée par les nombreux rebondissements de l’histoire de ce chanoine, qui s’est finalement enfui et qui a été recherché en France, au Liban, en Italie, et qu’on pensait avoir retrouvé à Beyrouth, lorsqu’on s’est aperçu que l’homme ramené à Paris était plutôt un prêtre québécois en pèlerinage.
Aussi impliqué dans des commerces de conserves alimentaires, de carrelage, de conserves de viandes et même de machines pour faire des trous de lacets dans les chaussures, le chanoine Rosenberg semblait véritablement avoir la maladie des affaires. Il empochait des sommes faramineuses, en dépensait autant, et finalement il a fini par être déclaré en faillite, mais on ne l’a jamais retrouvé!, explique l’autrice, qui a découvert dans ses recherches que Rosenberg aurait refait surface après la Première Guerre mondiale, avec des certificats d’autres sociétés qu’il avait encore lancées, mais qu’on a ensuite perdu sa trace complètement et à jamais.
Ce sont toutes ces aventures rocambolesques entourant ce chanoine et la fondation du village de Fannystelle qui sont dépeintes dans ce nouvel ouvrage où l’autrice n’a pas eu besoin d’inventer quoi que ce soit : là, vraiment, la réalité dépassait la fiction! Mais il faut lui pardonner, parce que c’est très amusant, toutes ces aventures, finalement!, ajoute Nadine Mackenzie, qui a effectué tant de recherches dans les journaux de l’époque à la Bibliothèque nationale de France, qu’elle aurait pu écrire une encyclopédie sur le sujet! Ayant fait sa sélection d’informations à livrer en fonction de ce qui avait trait au Canada et aux franco-canadiens, l’autrice affirme n’avoir rien eu à inventer, puisque tout lui a été donné sur un plateau d’argent une fois qu’elle avait effectué ses recherches.
Je trouve que l’histoire de l’Ouest est une mine d’or, lance celle qui n’en est pas à son premier roman historique sur le Manitoba. On découvre des personnages fascinants, parce que beaucoup d’entre eux arrivaient ici et pensaient que personne ne les connaissait, que personne ne saurait exactement ce qu’ils faisaient, donc qu’ils pouvaient se lancer dans des escroqueries de grande envergure et prétendre être des gens qu’ils n’étaient pas. Citant toutes les sources des informations présentées dans son ouvrage, Nadine Mackenzie espère aussi faire voir comment les gens vivaient à cette époque, lorsqu’ils arrivaient dans un autre pays, sur un autre continent, avec leurs grandes ambitions, leurs habitudes d’Europe et leurs idées du far west où ils croyaient être attaqués par des Indiens, ce qui n’était pas du tout la réalité.
Selon l’autrice, il faut voir le côté amusant des choses. Dans l’histoire en général, il y a des choses épouvantables, les batailles, les guerres, les camps de concentration où il n’y a rien d’amusant, mais quand des gens venaient, prétendaient, volaient et se pavanaient avec leur luxe et leurs ambitions de devenir multimillionnaire dans l’Ouest du Canada, il y a toujours un élément amusant, parce que les gens se font avoir à cause de l’appât du gain et de leurs rêves de posséder des terres démesurées par rapport à ce qu’ils avaient en Europe. Finalement, il faut reconnaître que l’Ouest s’est peuplé grâce à des personnages hauts en couleur et des histoires incroyables, et il faut donner raison à Nadine Mackenzie : le village de Fannystelle au Manitoba a une histoire assez rocambolesque.
Le roman historique Fannystelle de Nadine Mackenzie est publié aux Éditions de la nouvelle plume.
Alice Côté Dupuis
22 mai 2019